Les chevaliers de l’Apocalypse contre les gentils

cavaliers apocalypse

Pourquoi viser cet arc de cercle autour de la République ? Pourquoi  « choisir minutieusement« ,  selon les termes du communiqué de Daech, les différents spots qui balisent cet arc de cercle ?

Dans l’histoire du terrorisme parisien issu du proche et moyen Orient, ce furent d’abord les lieux de grands passages et de grands brassages qui étaient ciblés comme en 1986 la Rue de Rennes ou en 1995 la Place de l’Étoile, la station St Michel du RER B ou  le Musée d’Orsay ou encore  la Station Port Royal en 1996.

Ce furent aussi les lieux « juifs » comme la synagogue de la rue Copernic (1980) la Rue des Rosiers (1982) ou l’Hyper-Casher de la Porte de Vincennes.

Vendredi soir dernier,  pourquoi  avoir ciblé avec une précision  millimétrique l’arc qui s’enroule autour de la Place de la République et de sa statue ?

Parce que la République catin, athée et mécréante  doit être punie pour s’être convertie en chapelle  ardente dédiée aux journalistes de Charlie exécutés par les « frères djihadistes » ? Parce que le siège de Charlie était proche  et qu’il fut transféré à deux pas à Libération et donc que ce territoire est d’une façon ou d’une autre maudit ?

Possible.

Possible aussi que les Djihadistes dont il est difficile de suivre toutes les obsessions et quand bien même ils avaient manifestement l’intention de s’attaquer de manière simultanée au Stade de France aient d’abord consacré une nouvelle centralité parisienne.

Celle des flux et fêtes qui se sont organisés en moins de deux décennies  autour du Nord Est de la capitale. Voilà dix ou quinze ans, la rue Bichat était en effet une voirie lugubre bordant le noir Hôpital St Louis, la rue de la Fontaine au roi itou, le bd Voltaire était plutôt un égout à voitures et le Bataclan, scène parisienne fertile, faisait plutôt  figure d’exceptionnel isolat dans le quartier.

Aujourd’hui, la République pétille et phosphore à tous les carrefours entre X° et XI° . Hier lieu de passage des labeurs ouvriers, elle est  devenue lieu de vie. C’est  l’échangeur  et le fixateur  d’un archipel de start-upers  & upeuses, d’abeilles des nouvelles économies  qui se retrouvent à tchatcher a la sortie de leurs « ateliers », de leurs « agences », de leurs « labos » artisanaux  à haute valeur ajoutée  dans d’innombrables restos,  bars after et before, terrasses Bobo-Hipster en tous genres.

Des jeunes,  de la vingtaine jusqu’à la grosse trentaine, plutôt bien dans leur peau et plugués  sur l’économie monde. Des jeunes Bobos-Hipsters qui se convainquent dans leurs QG minuscules qu’il est possible de redonner la niaque au vieux monde à force d’applis, d’imprimantes 3D, de levées de fond, de manips digitales ….

Une jeunesse un peu dorée, entrepreneuse, tolérante, polie, interactive, créative, acquise aux métissages, cultivant des plaisirs plutôt raisonnables, tirant des joints par toutes petites taffes, buvant  sans trop se murger,  pas Halal  mais souvent tout aussi observante sur les prescriptions  du label Bio. Et si elle penche pour Voltaire, c’est plutôt dans une  version très  abrégée et  fort light.

Ces jeunes gens-là,  se projettent cependant avec une étonnante  ingénuité   dans un futur qu’ils jugent perfectible.  Perfectible et  réformable. Parfois même reprogrammable.  Le  futur tout court, ils y croient,  tout  minoritaires qu’ils puissent être, dans une Europe où le spleen, la précarité, la régression  pèsent si lourd.

Eux,  ils  persistent  à  croire avec la foi du charbonnier à une très durable  et très contagieuse  légèreté  démocratique de l’être. Y compris si cette bonhommie bouche en coeur en exaspère plus d’un

Pour  l’Internationale des Possédés de Daech, pour les snipers bourreaux qui ont le même âge que leurs victimes, qui sont de la même France  mais pas du même côté du mur, en revanche, c’est sûr,  cette assurance à la cool est un pied de nez  insupportable.  C’est même une menace. Un bas bruit de fond qui ne doit pas prospérer. Cette optimisme viral est  la négation de l’Apocalypse que le Bureau Politique des djihadistes sunnites appelle de ses vœux à grands seaux de sang.

L’énorme dessein de Daech, c’est en effet d’attiser le désespoir des jeunes hommes torches. Non par sadisme mais pour précipiter la fin des temps. Il suffit de lire la littérature de Daech en ligne en anglais mais aussi en français pour comprendre   qu’ils ne  sont pas des islamistes à la vieille mode cairote des Frères Musulmans.

Ceux-là,  nous les connaissons bien. A force, ils nous sont devenus  familiers mais ils  se sont démodés. Ils ne font plus rêver les fous de Dieu. Ils n’étaient finalement que  des léninistes  de mosquées  qui cherchaient le pouvoir en  se servant des sourates  comme de  chausse-pieds.

Les prophètes armés de Daech, c’est toute autre chose.

Eux sont des incendiaires du temporel. Ils  ne veulent pas aménager le monde  ou le dominer. Ils veulent l’anéantir. Ils veulent à haute voix  le chaos et la fin des fins.

Ils veulent mordre à pleine dents dans les  cendres de l’Histoire. La nôtre et aussi la leur que nous aurions  contaminée. Au bout : le riche et pâle linceul de la  parousie islamique.

L’énergie physique  destructrice est, c’est exact,  toujours formidablement  facile à libérer.  Plus facile que la force  de la construction qui ajuste  brique après  brique. Chromosome après chromosome.

Question : pourquoi déchaîner tant de foudres contre des innocents si candides ? La jouissance de la  violence gratuite ? La facilité ? Pas si sûr.

Peut-être  que lorsque ces  Croisés  du Croissant lâchent leurs rafales  sur les Bobos-Hipsters  sirotant de la limonade ou du Champagne, sur ces  grands ados tolérants, pacifistes, gentillets  et multiculturalistes, ils ne s’en prennent pas seulement à des fêtards.  Peut-être qu’Ils ne pilonnent pas seulement une nouvelle géographie parisienne de la nuit. Peut-être  qu’ils ne voient pas en eux seulement des pantins sans défense qu’on peut tirer comme des lapins.

Peut-être que ces Bobos-Hipsters  représentent à leurs yeux  une véritable menace de long terme. Bien plus redoutable  que  tous les identitaires   plutôt perçus par les Djihadistes comme des  cousins  éloignés.

Eh oui, un des grands cauchemars  du Djihadiste   pourrait bien être   un doux, un vulnérable, un désarmé, un jeune professeur Tournesol qui regarde les demoiselles dans les yeux et ne néglige pas le bas des reins, une jeune manageuse qui laisse voir ses jambes et ses cheveux et n’a pas honte de son corps,  un prosélyte sans catéchisme qui va simplement  prêchi prêchant que  le monde malade est réparable, qu’on  peut à force de culots, d’initiatives, de savoirs, de rires,  faire en sorte qu’il ne s’effondre pas sur lui-même   comme un ballon crevé.

Cette hypothèse d’une rédemption et d’une extension de la vie,  si fragile soit-elle, est à n’en pas douter  insupportable aux yeux des Djihadistes élevés dans le culte rétréci  d’un Dieu faucheur, vengeur, jaloux, croque-mort  qui aurait troqué la vieille miséricorde qu’il avait héritée du judéo-christianisme contre la seule radicalité nihiliste.

Il ne suffit pas  que les commandos-spectres  massacrent les bobos-hipsters et apparentés. Il  faut qu’ils instruisent le  procès en sorcellerie  de   ces infidèles,  de ces californiens d’Europe,   avant de les crucifier.

Dans le  Bataclan transformé en Temple, Ils deviennent donc des « idolâtres » qui sacrifient à une « fête de la perversité » (communiqué Daesch) .

Parce que le groupe « Eagles of Death Metal »  sacrifie aux divinités  païennes  forcément démoniaques ?

Parce qu’il chante  « Kiss The Devil » ?

Foutaises !

Le groupe californien serait plutôt, selon les experts du rock,  très second degré, cultivant l’humour à grosse louche de Rabelais et  à  coups de …   braguette du nom de leur dernier album…

Les Cavaliers de l’Apocalypse contre les Gentils ?

Ce serait aussi ça le scénario criminel  de vendredi soir ?

En tous cas, il y a de ça dans le choix des lieux et des cibles des fusillades. Dans cet acharnement à éviscérer et mutiler  des jeunes gens et des jeunes filles aux mains nues et sirotant des mojitos  juste parce qu’ils ne croient pas une seconde que la grande nuit ne va pas succéder aux promesses des aubes.

S’il  y a un  peu de vrai dans ce raisonnement, il faut aller au bout. Et discerner sous le tas  de cadavres  parisiens un petit filet d’espoir.  Reconnaître que la  force  que les Cavaliers de l’Apocalypse prêtent  à ces Gentils start-up-ers et autres Bobos-Hipsters est peut-être bien plus féconde, plus puissante et plus vitale qu’on ne l’imagine nous même.

La force collective des petites lumières contre celle de la rage suicidaire. Alors,  ces Hipsters Bobos,  ces sapeurs des terres promises, ces ravis de la crèche qui disent « Waouh » à tous bouts de champ,   ne seraient pas morts tout à fait pour rien.

Qu’on se le dise pour se consoler un peu : l’apocalypse aussi est mortelle.

Guillaume Malaurie

Soucre : Nouvel Obs

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Manuel Valls a secrètement rendez-vous avec le leader de l’extrême droite israélienne

Deux poids, deux mesures. À la tête du combat politico-médiatique contre « l’extrémiste » Dieudonné, Manuel Valls s’apprête à rencontrer -loin des caméras- Avigdor Lierberman, ministre israélien des Affaires étrangères et dirigeant d’un parti d’extrême droite.

Faisons un pari: David Pujadas et ses confrères de la presse écrite et audiovisuelle ne demanderont pas au ministre, comme à l’accoutumée, des éclaircissements sur ce sujet. L’objet de l’omerta? Une rencontre -en catimini- entre Manuel Valls et Avigdor Lieberman doit se tenir dans les 48 heures. Ce mercredi 12 février, le ministre israélien des Affaires étrangères est arrivé à Paris pour une série d’entretiens évoqués, dans les grandes lignes, sur le site de son ministère. Selon le communiqué officiel, son homologue Laurent Fabius, des députés et des sénateurs, des dirigeants de la communauté juive et les représentants d’organisations anonymes « travaillant à renforcer les liens entre Israël et la France » seront les interlocuteurs d’Avigdor Lieberman. But essentiel du voyage: discuter des points de convergence et de désaccord au sujet de l’Iran et des sanctions internationales, partiellement levées par la France et les Etats-Unis.

Surprise, surprise. Parmi les personnalités rencontrées en figure une qui n’est pas censée, a priori, être présente durant la visite officielle d’un ministre des Affaires étrangères: Manuel Valls.

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Ce dernier n’est pas exactement l’homologue de Lieberman. Par ailleurs, le ministre israélien des Affaires étrangères n’a pas de fonction relative à la communauté juive internationale, ce qui aurait pu justifier sa rencontre avec Manuel Valls, en charge de l’Intérieur mais aussi de la gestion des cultes.

Autre mystère: l’agenda du ministère de l’Intérieur ne fait aucune mention de cette rencontre. Et pour cause: la semaine du 10 au 16 février est curieusement absente du calendrier. À l’inverse, l’agenda de Laurent Fabius n’omet pas de signaler, comme il se doit, sa rencontre avec son homologue israélien, prévue vendredi à 11h, juste après le Conseil des ministres.

Mais, d’ailleurs: qui est Avigdor Lieberman?

En novembre dernier, suite à son acquittement par un tribunal de Jérusalem (l’homme était inculpé pour fraude et abus de confiance), Le Monde le qualifiait -avec une infinie délicatesse-  de« personnage controversé ».

Certes: ses prises de position peuvent prêter à la polémique. En 2009, Arte lui consacra ainsi un bref reportage à travers l’exposition du racisme décomplexé de ses militants.

 

L’historien israélien Shlomo Sand avait déjà insisté -en 2009, lors d’un entretien avec L’Express sur le radicalisme « identitaire » de Lieberman, ajoutant qu’il était « pire que Le Pen ».

En novembre 2012, cet ultra-nationaliste, originaire de Moldavie et bientôt placé à la tête de la commission parlementaire des affaires étrangères et de la défense, était invité par un prestigieux think-tank américain, The Brookings Institution, afin d’exposer sa vision singulière de la politique internationale. A titre d’illustration -parmi tant d’autres exemples disponibles- de son idéologie, on peut ainsi l’entendre exprimer -à la 26ème minute de la vidéo suivante- son regret au sujet de Moïse, qui aurait dû mener son peuple « au Bénélux » plutôt qu’au Moyen-Orient car les pays voisins seraient plus aimables que ceux entourant Israël.

 

En décembre 2013, de nouveau invité par le même think-tank, Lieberman réfuta « complètement », à la 55ème minute de la vidéo ci-dessous, le mot « occupation » employé par une auditrice du public. Selon l’homme redevenu ministre un mois plus tôt, il ne peut pas y avoir  « occupation » des territoires palestiniens car, entre autres explications, il n’y avait pas d’État palestinien avant 1948.

 

En ce mois de février, l’ultra-radical Lieberman serait en train, selon des observateurs de la vie politique israélienne, de tenter de modérer l’image de son parti, classé à l’extrême droite, afin de gagner en crédibilité pour briguer, à l’avenir, le poste de Premier ministre. 

Ce qui ne l’empêche pas de continuer à rassurer son électorat le plus extrémiste: à l’instar de son collègue Uzi Landau, l’homme continue ainsi de prôner « des transferts de populations et de territoires, et notamment que certaines zones peuplées par des Arabes israéliens fassent partie d’un futur Etat palestinien ». En clair, il s’agirait de remettre des villes arabes israéliennes à l’Autorité palestinienne en échange de la souveraineté sur des colonies juives en Cisjordanie. Une proposition à laquelle s’est déjà opposée le président Shimon Peres : « Israël ne peut pas retirer leur citoyenneté à ses ressortissants simplement parce qu’ils sont Arabes. »

Pour comprendre l’impact d’une telle proposition au sein de la population ciblée, un reportage récemment diffusé par une chaine israélienne donne un éclairage intéressant quant à la perception de la société civile arabe.

 

Qu’en est-il de Manuel Valls? Sa rencontre secrète avec Lieberman ressemble à une séance de rattrapage. En novembre, le ministre de l’Intérieur avait annulé une visite dans l’État hébreu en raison des révoltes sociales en Bretagne. L’homme devait initialement venir renforcer la coopération policière (et notamment l’échange d’informations dans le domaine sensible et opaque du renseignement) entre Paris et Tel Aviv.

Lieberman n’est pas chargé des questions policières mais s’il devait continuer son ascension dans la vie politique israélienne, il deviendrait, de facto, un personnage incontournable, notamment pour le ministre français qui s’était déclaré, en novembre 2012, « absolument engagé pour Israël ». Dans l’affaire Dieudonné, Valls a fait preuve d’un activisme singulier et influencé par ses propres relais amicaux au sein du Crif. Aujourd’hui, sa volonté de nouer des liens avec un extrémiste israélien notoire confirme, si besoin était, son « humanisme républicain » à géométrie variable: s’indigner de Dieudonné pour se lier d’amitié avec Lieberman ne manque pas de piquant.

Espérons, dès lors, que la rencontre secrète entre les deux hommes se tiendra ce vendredi 14 février, au jour propice de la Saint-Valentin: cela ne serait que justice pour l’élu d’une République laïque et souveraine qui osa pourtant se déclarer, « par {sa} femme, lié, de manière éternelle, à la communauté juive et à Israël ».

« Quand même ».

Hicham HAMZA

Addendum 13/01/14: l’agence Sipa Media confirme aujourd’hui la rencontre Valls-Lieberman.

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L’information, annoncée mardi 11 février par le ministère israélien des Affaires étrangères et reprise le lendemain par Panamza, n’avait été rapportée jusqu’alors que par la presse israélienne, américaine et libanaise.

Sources : Panamza et E&R

La troisième Guerre mondiale commencera-t-elle au Moyen-Orient ?

Source : MediaBeNews

Reportage Enquête Exclusive M6 sur la LDJ

Communiqué de la LDJ suite au reportage