La Suède ébranlée par une quatrième nuit d’émeutes à Stockholm

Les violences semblent avoir été déclenchées par la mort d’un homme dans la banlieue d’Husby, tué par la police alors qu’il brandissait une machette.

Dans la banlieue de Stockholm, le 21 mai.

La Suède a connu mercredi soir une quatrième nuit de violences dans des quartiers défavorisés de la banlieue de Stockholm, avec incendies de voitures, bris de vitres et jets de pierres par des groupes de jeunes.

Malgré l’appel au calme lancé par le Premier ministre, les émeutiers sont de nouveau sortis dès la tombée de la nuit mercredi, les violences se déplaçant de Husby, au nord de Stockholm, vers le sud. Le feu a été mis à un commissariat de police à Ragsved, dans la banlieue sud de Stockholm, a annoncé la presse locale. Il n’y a pas eu de blessé et le feu a pu être rapidement éteint.

« Une société divisée »

À Hagsätra, un autre quartier du sud de Stockholm, une cinquantaine de jeunes ont lancé des pierres contre la police et brisé des vitres, pour ensuite s’éparpiller dans différentes directions, raconte Selcuk Ceken, qui travaille dans un centre pour jeunes. Les jeunes avaient une vingtaine d’années et semblaient bien organisés, ajoute-t-il. « Il est difficile de dire pourquoi ils font ça », dit-il. « Peut-être en veulent-ils à la loi et aux forces de l’ordre, peut-être est-ce de la colère pour leur situation personnelle, comme le chômage, ou parce qu’ils n’ont pas d’endroit pour vivre. » Rouzbeh Djalaie, du journal local Norra Sidan, qui couvre Husby, signale les contrôles d’identité à répétition auxquels sont soumis les jeunes.

Des violences ont également eu lieu dans le sud du pays. À Malmö, deux voitures ont été incendiées, a annoncé la police. Au total en quatre nuits, des magasins, des écoles, un commissariat de police et un centre culturel ont subi des dégâts. Un policier a été blessé dans les dernières violences et cinq personnes ont été arrêtées pour tentative d’incendie.

Les émeutes semblent avoir été déclenchées par la mort d’un homme de 69 ans dans la banlieue d’Husby, tué par la police alors qu’il brandissait une machette, ce qui a déclenché des accusations de brutalité policière. Les troubles se sont ensuite étendus de Husby, où vivent de nombreux immigrés, à d’autres banlieues pauvres de Stockholm. « On a une société qui devient de plus en plus divisée et où le fossé se creuse, à la fois socialement et économiquement », commente Rami Al-khamisi, cofondateur de Megafonen, un groupe qui milite pour le changement social dans les banlieues.

Voitures en feu

Les émeutes sont pour l’instant moins graves que celles des deux derniers étés au Royaume-Uni et en France, mais sont là pour rappeler que même dans des lieux moins touchés par la crise financière que la Grèce ou l’Espagne, les pauvres, et en particulier les immigrés, ressentent durement les politiques d’austérité. Les images de voitures en feu diffusées par les télévisions sont un choc pour la Suède, réputée pour sa politique de justice sociale ainsi que pour son hospitalité envers les réfugiés. « Je comprends pourquoi beaucoup de gens qui vivent dans ces banlieues et à Husby sont inquiets, en colère et préoccupés », a déclaré la ministre de la Justice Beatrice Ask. « L’exclusion sociale est une cause très importante de nombreux problèmes. Nous comprenons cela. »

Après des décennies de « modèle suédois » fondé sur un État providence généreux, le rôle de l’État en Suède a fortement diminué depuis les années 1990, entraînant la hausse des inégalités la plus forte de tous les pays membres de l’OCDE. Près de 15 % de la population suédoise est d’origine étrangère – la proportion la plus élevée de tous les pays scandinaves. Le taux de chômage touchant cette population est de 16 %, contre 6 % pour les Suédois « de souche », selon les chiffres de l’OCDE. Le journal de gauche Aftonbladet qualifie « d’échec cuisant » les politiques gouvernementales, qui ont, dit-il, soutenu le développement des ghettos dans les banlieues.

Signe des tensions croissantes, un parti anti-immigration, les Démocrates suédois, pointe en troisième place dans les sondages en vue des élections législatives de l’an prochain. « Nous n’avons pas réussi à donner un espoir à bon nombre de personnes qui vivent en banlieue, » a déclaré au journal Svenska Dagbladet Anna-Margrethe Livh, membre du Parti de gauche (opposition).

Source : Le Point

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Qui, de la Chine ou de Facebook, dominera le monde ?

 

Les Etats-Unis ayant succédé à la Grande-Bretagne comme puissance dominante, dès le XX e siècle, beaucoup pensent que le XXI e siècle sera celui de la Chine.

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C’est là un raisonnement de type purement national. Certes, l’empire du Milieu est encore la première communauté de la planète, mais, d’ici peu, il sera dépassé par Facebook, qui compte aujourd’hui 1 milliard de membres environ. La nouvelle puissance n’est pas là où on l’attend. C’est, déjà, l’individu. Où qu’il soit, aux Etats-Unis ou en Chine.

Pendant des siècles, les principaux acteurs sur la scène universelle furent les princes et leurs familles, qui résidaient dans des villes-Etats puis dans des Etats-nations. Après 1945 apparurent la quasi-totalité des organisations internationales (ONU, FMI, OCDE, GATT-OMC, OMS, etc.). A ces deux grands acteurs sont venues s’ajouter les organisations non gouvernementales (ONG), ainsi dénommées depuis 1944, même si les toutes premières datent du XIX e siècle, notamment la Croix-Rouge. L’explosion de leur nombre a modifié la gouvernance mondiale depuis quelques décennies. Dans ce concert, quelle que soit la période de l’histoire à laquelle on se réfère, les individus n’ont joué que des rôles marginaux. De Spartacus au jeune Chinois planté les bras en croix devant les chars de la place Tiananmen (5 juin 1989), quelques-uns se sont illustrés, mais ils n’ont jamais modifié durablement le cours de l’histoire. Les puissants ont toujours prétendu agir au nom du peuple et pour son bien, maintenu néanmoins au rang de piétaille et/ou de chair à canon.

Et si les réseaux sociaux étaient des nations virtuelles, avec leur propre régime, leur propre monnaie ? Si c’était le cas, en 2016 Facebook pourrait devancer la Chine. Trois ans plus tard le nombre de membres de Facebook pourrait être beaucoup plus grand que le nombre d’habitants en Chine.

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Ce monde est moribond. Dans celui qui naît, l’individu joue le rôle principal. La révolution numérique et Internet ne le mettent pas seulement en ligne, mais en première ligne. Il peut se connecter à ses semblables du monde entier, à chaque instant. Il n’est plus dans le monde, le monde est en lui. Des liaisons provisoires se forment avant de se volatiliser, des accords temporaires se nouent avant de se rompre, des alliances précaires s’établissent avant de s’évaporer. Cette oscillation permanente qui tisse de nouveaux liens entre le solidaire et l’éphémère ne permet plus aux vieux pouvoirs d’exercer leur pression habituelle. Femmes et hommes n’acceptent plus qu’on pense pour eux, qu’on parle pour eux, qu’on agisse pour eux. Ils sont aujourd’hui des milliards dans ce cas, même si tous ne parviennent pas encore à l’exprimer comme ils le voudraient. « Le pape, combien, de divisions ? », demandait Staline. Désormais, c’est Untel, combien de « followers » ?

Aussi les questions qui désormais se posent à nous, à nous tous, sur tous les continents de notre bonne vieille planète, sont donc celles-ci : comment peut s’organiser un monde où chacune et chacun revendique le droit d’exister, individuellement et socialement, sans médiation ? Quelle régulation respectueuse devons-nous, tous ensemble, imaginer ? Quel futur devons-nous construire pour que, tous ensemble, nous construisions un présent acceptable pour chacun d’entre nous ?

Sources : François Rachline sur Les Echos et Ya-Graphic